Retour sur le webinaire « Intégrer la santé-environnement dans les documents de planification »
La santé influencée par une multitude de déterminants
Premier intervenant, Clément Deloly, chargé d’étude urbanisme et santé à l’EHESP (École des hautes études en santé publique), a idéalement introduit le débat en rappelant que la santé est une notion complexe, qu’il faut envisager dans sa globalité. L’état de santé d’une population dépend en effet de l’exposition à un large panel de déterminants de santé, dont beaucoup sont liés à l’environnement physique, social et économique (qualité de l’air, de l’eau, des sols, habitat, transports, accès aux équipements et services, etc.). Ainsi, l’organisation du système de soins (offre en matière de prévention et d’accès aux soins) ne serait qu’un déterminant parmi d’autres, contribuant pour une part modérée (20%) à l’état de santé d’une population. Dès lors, il apparaît essentiel d’agir sur l’ensemble des déterminants de santé, et les politiques publiques d’aménagement ont un rôle majeur à jouer en la matière.
Clément Deloly est ensuite revenu sur la définition de l’Urbanisme favorable à la santé (UFS), concept initié par l’OMS en 1987. Pour mettre en place une démarche UFS à l’échelle des territoires, il a mis l’accent sur la nécessité du partage d’une culture commune (dynamique de réseaux, rencontres, formations…), l’adoption d’une approche systémique de la santé (cadre de vie, structures sociales et économiques, milieux et ressources…) et l’appui sur des démarches et outils pour intégrer la santé.
Le rôle stratégique des SCoT
Deuxième personne à avoir pris la parole, Julien Roissé est référent Grand Ouest à la Fédération des SCoT (Schémas de cohérence territoriale). Le temps d’une présentation très riche, il a évoqué le rôle important que peuvent jouer les SCoT en termes d’UFS, grâce notamment à leur approche écosystémique de l’observation du territoire, renforcée par les ordonnances de la loi Elan (publiées en 2020 et applicables en 2021). Dans la hiérarchie des normes des documents d’urbanisme, le SCoT modernisé fait office de document pivot et intégrateur, entre le SRADDET (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires) à l’échelle régionale et les PLU(i) et PCAET (Plan climat-air-énergie territorial) à l’échelle (inter)communale. Ainsi, les choix d’aménagement d’un SCoT peuvent orienter un PLU(i) vers la réduction des polluants et des nuisances, la promotion de styles de vie sains, une amélioration de l’environnement social ou encore la correction des inégalités sociales face à la santé. Par sa dimension stratégique affirmée, le SCoT peut donc être la bonne échelle pour mettre en place une stratégie locale UFS, en lien avec les acteurs locaux.
Pour illustrer son propos, Julien Roissé a évoqué deux exemples, dont celui, emblématique, du Grand Douaisis dans les Hauts-de-France. « Il s’agit de la Rolls-Royce en termes d’intégration de la santé environnementale à un SCoT », a même précisé l’intervenant, qui en a détaillé les particularités. À partir de 2018, le syndicat mixte du Grand Douaisis a co-construit un schéma de santé, en mettant autour de la table des acteurs n’ayant pas l’habitude de travailler ensemble : élus, institutionnels, monde médical, médico-social et usagers. Cette large concertation a permis l’analyse des vulnérabilités de santé sur le territoire, synthétisées sur une carte afin de s’interroger sur les enjeux localisés. Ainsi, le document d’orientation et d’objectifs (DOO) du Grand Douaisis s’est trouvé enrichi d’un chapitre « cohésion sociale » faisant la part belle au développement d’un UFS : prise en compte de la pollution des sols dans les documents d’urbanisme, zones tampons pour préserver la qualité de l’air et limiter les nuisances sonores, mais aussi la pollution électromagnétique générée par les lignes à (très) haute tension, etc.
Sur d’autres territoires tels que celui de Narbonne, on trouve plusieurs traductions de l’UFS dans le SCoT à travers des thèmes tels que l’eau, les risques, la vie sociale et économique, le mode de vie…
Un référentiel régional et des guides nationaux pour impulser et accompagner les démarches d’UFS
Après ces exemples concrets, la deuxième partie du webinaire présentait deux outils mobilisables pour intégrer la santé dans les documents de planification : l’un spécifiquement développé pour les Pays de la Loire, et l’autre à l’échelle nationale.
Damien Le Goff, Ingénieur d’études sanitaires à l’ARS Pays de la Loire, a présenté un Référentiel dont l’élaboration a fait l’objet d’une collaboration entre l’ARS, la DREAL et les DDT(M) dans le cadre du PRSE3, à l’attention des collectivités, aménageurs et bureaux d’études ligériens. Celui-ci prend la forme d’un recueil de 14 fiches (une fiche socle et 13 déterminants de santé), toutes organisées de la même manière : des éléments de contexte général pour bien saisir la problématique (chiffres clés et enjeux de santé), des éléments pour alimenter la réflexion localement (données disponibles en région, traduction dans les PLU(i) et SCoT) et une partie pédagogique avec mise à disposition de documents. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter notre article dédié sur le site du PRSE3.
Clément Duloly, enfin, a repris la parole pour conclure avec un outil à la portée nationale : le guide ISadOrA, développé par une équipe projet interdisciplinaire coordonnée par l’EHESP entre 2017 et 2019. Destiné à accompagner les professionnels, cet outil vise à intégrer la santé à toutes les étapes d’élaboration d’un projet d’aménagement. Ceci en ayant recours à 15 clés réparties entre « clés de processus » (gouvernance santé, portrait santé/environnement et démarches participatives) et clés de conception (exposition des populations, qualité des logements, cohésion sociale, espaces verts, îlots de chaleur urbaine…). En prenant en compte les préconisations de chaque clé pour les traduire en actions concrètes, les aménageurs travaillent à un UoFS (Urbanisme opérationnel favorable à la santé). Ce guide peut aussi être utilisé lors de l’élaboration des documents de planification. Clément Deloly l’illustre avec la clé « accessibilité, emplois, commerces, équipements, services ». Au niveau des PLU(i) les opérations d’aménagement programmées (OAP) permettent aussi d’apporter plusieurs orientations bénéfiques pour la santé en amont de l’étape opérationnelle. Enfin, Clément Deloly évoque comment le PLUi de Rennes Métropole a adopté cette démarche d’UFS et la manière dont cela s’est traduit dans le document.
Vous retrouverez ci-dessous les présentations :
- par Clément Deloly, Chargé d’étude urbanisme et santé à l’EHESP - par Julien Roissé, Fédération des SCoT - par Damien Le Goff, Ingénieur d’études sanitaires à l’ARS Pays de la Loire - par Clément Deloly Chargé d’étude urbanisme et santé à l’EHESP
Retrouvez les enregistrements vidéos des interventions ainsi que l’ensemble du webinaire :
- Première Intervention de Clément Deloly
- Intervention de Julien Roissé
- Intervention de Damien Le Goff
Le programme complet des webinaires du cycle Santé et urbanisme est disponible sur le site du Comité 21.